€t toi t'€n f€ra$ quoi?
Pour Mme Adeline Wrona
CMM, 2007
Félix Beaulieu
« Bonjour mademoiselle est-ce que je peux vous déranger deux minutes pour WWD?
-Deux minutes? Nan mais ça va pas. Tu viens déjà de me déranger 10 secondes, et c'est 10 de
trop! Allez au revoir! Et bon courage quand même! »
Espèce de grosse connasse.
« -Bon...ok...au revoir... »
Je reste calme. Face à la connerie, c’est toujours l’attitude qui domine chez moi. Je m’appel
Julien et je crois être calme. Aujourd’hui c’est mon centième recalage sec. Je ne sais plus quoi
penser sur l'humanité des gens… Moi qui était plein d’espoir en commençant ce travail pour
WorldWide Doctors. Je croyais que ça serait assez facile de convaincre des inconnus de
débourser un peu, de donner une petite quantité d’argent à cette association. Comment peut-on
se montrer insensible à cette cause ? La santé dans le monde, celle des enfants en particulier,
ça devrait être un sujet consensuel.
Je suis un « recruteur de donateur » pour WWD depuis 4 semaines et trois jours. La mission se
termine après-demain. C’est une bonne mission, mais moi je suis plutôt un recruteur moyen. Ça
fait plusieurs semaines que je travail dans la rue à arrêter les passants, des inconnus dans leur
immense majorité. Mon équipement est rudimentaire : tee-shirt siglé, remplacé par sweat-shirt et
anorak les jours de mauvais temps, un sac à dos qui contient les bulletins de réserves et en
général une bouteille d’eau. Aujourd’hui je n’ai pas pris le bon sac. Celui-ci est trop petit et me
râpe le dos. Ça me brûle. S’ajoute le plus important : une pochette pour écrire, à l’intérieur de la
documentation et des bulletins. Le stylo est avec le sourire l’arme ultime qui vient compléter
l’arsenal du recruteur-persuadeur.
Tous les jours on change d’endroit, de « spot » comme on dit. La règle d’or du bon spot c’est
qu’il n’y a pas de règle d’or. Tout doit venir de toi. Le bon recruteur il trouve des donateurs
n’importe où. C’est ce qu’on nous dit. Mais bon, on remarque des choses quand même,