François Coppée
Contes tout simples
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François Coppée
1842-1908
Contes tout simples
La Bibliothèque électronique du Québec
Collection À tous les vents
Volume 169 : version 1.01
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François Coppée est l’auteur de poésies, de pièces
de théâtre (Le passant, 1869 ; Pour la couronne, 1895)
et de contes (Contes rapides ; Contes tout simples).
Après une grave maladie, il revient au catholicisme ;
son roman, La bonne souffrance, publié en 1898, est
inspiré de cette expérience. Antidreyfusard, il participa
à la fondation de l’association antisémite dite Ligue de
la patrie française, avec Barrès et Jules Lemaitre.
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Contes tout simples
(Paris, Libraire A. Lemerre.)
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La petite papetière
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Dans le faubourg, – une rue assourdissante,
populeuse, où, du matin au soir, les vitres tremblaient
au fracas des camions et des omnibus, – tout le monde
connaissait, estimait et respectait la petite papetière. Et
l’on avait bien raison ; car il ne se pouvait rien voir de
plus gentil que cette blondinette en robe noire bien
ajustée, dans sa boutique si proprement tenue, quand
elle pliait lestement les journaux du soir qui sentaient
bon l’imprimerie toute fraîche. Je dis blondinette, je
devrais plutôt dire roussotte ; car la chevelure, trop
abondante pour être toujours bien peignée, tirait sur le
cuivre, et, dans le joli et régulier visage, dont quelques
taches de son piquaient le teint rose, deux yeux
charmants étincelaient, couleur de noisette.
Accorte, complaisante, aimable, comme il faut l’être
dans le commerce, mais pas effrontée pour un liard,
avec, dans toute sa personne, ce je ne sais quoi de
décent, c’était vraiment là un amour de petite papetière.
Si vous aviez demeuré dans le quartier, je suis sûr que,
tous les matins, en allant à votre atelier ou à votre
bureau, vous vous seriez détourné de votre chemin afin
d’acheter votre journal chez elle plutôt qu’ailleurs. Ils
n’y manquaie