Dictateurs et dette : clarifions les règles
Dans «Odieuse ou insidieuse» (décembre 2004), Raghuram
Rajan passe en revue des formules visant à limiter la dette
odieuse telles que l’approche que nous avons exposée dans
votre magazine il y a deux ans («La dette odieuse», juin
2002). Rajan émet la crainte que la limitation des prêts aux
régimes odieux n’ait pour effet non intentionnel de rendre
plus difficile l’accès à l’emprunt pour les gouvernements légi-
times. Si un gouvernement légitime emprunte et qu’un ré-
gime odieux vient à le supplanter, celui-ci sera, dans le nou-
veau contexte, moins à même de rembourser la dette qu’il a
héritée et moins incité à le faire, selon Rajan.
Un régime odieux sera moins à même de rembourser la
dette héritée si de nouveaux prêts sont nécessaires pour fi-
nancer des projets en cours et lancer de nouveaux projets qui
assurent des entrées de fonds au pays. S’il arrive souvent, et
nous en convenons, que les pays se développent suffisam-
ment pour sortir de l’endettement, il semble peu probable
que les régimes odieux empruntent vraiment à cette fin. Cela
supposerait que la capacité d’emprunter permette au dicta-
teur de développer l’économie et, surtout, que celui-ci dé-
pense les gains en résultant au profit du pays. Si l’emprunt du
dictateur sert bel et bien les intérêts des citoyens, nous ad-
mettons qu’il ne faut pas s’y opposer. Les dictateurs vraiment
odieux, toutefois, n’empruntent pas pour développer l’éco-
nomie et, en aucun cas, n’en font profiter le peuple.
Rajan souligne par ailleurs qu’un régime odieux sera moins
incité à rembourser la dette, car il n’aura plus pour motiva-
tion la perspective de pouvoir continuer à emprunter tant
qu’il rembourse. Une solution à ce problème est celle qui con-
siste à reporter la dette héritée jusqu’à ce qu’un gouverne-
ment légitime prenne le pouvoir. Le pays aurait toujours pour
responsabilité de régler la dette, majorée des arriérés, et les
créanciers pourraient s’attendre à être remboursés à temps.
Rajan a raison de souligner que, comm